LA PIROGUE



GÉNÉRALITÉS



J’ai lu sur le site de e-sushi.fr cette très belle introduction d’un texte traitant des pirogues polynésiennes. « Placée au cœur des relations du Polynésien et de son environnement immédiat, la pirogue a toujours constitué, jusqu’à un passé très récent, le premier moyen de migration, de communication, de luttes et d’échanges. Mais, si la pirogue fut le moyen de transport physique des hommes, ainsi que des plantes et des animaux nécessaires à leur survie, elle véhicula également leur organisation sociale, politique et religieuse à travers le pacifique. »
Ce texte résume de façon brève, précise et complète tout ce que représente une pirogue et un canoë, de quel peuple qu’il soit, où qu’il soit : un moyen de transport, certes, mais aussi et surtout une représentation unique de la vie sociale, politique et religieuse de ceux qui le détiennent.

La pirogue est une embarcation longue et étroite, souvent faite d'un seul tronc d'arbre creusé (monoxyle), mue à la voile ou à la pagaie et parfois équipée d’un balancier. Les pirogues ne sont pas liées spécifiquement au domaine marin même si aujourd'hui leur utilisation persiste surtout dans les zones tropicales et équatoriales, en Afrique, en Asie du Sud-Est, en Océanie et dans quelques régions d'Amérique. Étymologiquement, le mot « pirogue » est sans doute à rapprocher du mot maya piragua désignant un petit canot, mot qui passa à l'identique en espagnol puis fut francisé.

L'invention de la pirogue est très ancienne comme en témoignent les embarcations du Néolithique mises au jour par les archéologues lors des fouilles et de l'étude des cités lacustres : la pirogue de 9,35 m, creusée dans un tronc de chêne et parfaitement conservée dans les marnes du bord du lac de Chalain dans le Jura, et visible au musée archéologique de Lons-le-Saunier en est un bon exemple.

LA PIROGUE DE PESSE


La pirogue de Pesse est considérée comme étant le plus ancien bateau connu au monde. La datation au carbone indique que le bateau a été construit au cours du début de la période mésolithique, entre 8040 av. J.-C. et 7510 av. J.-C. Il est actuellement exposé au Musée régional de Drenthe à Assen, aux Pays-Bas. Le bateau est une pirogue monoxyle mesurant 298 cm de long et 44 cm de large. Il est constitué par un seul tronc de pin sylvestre. Des marques sont présentes dans la cavité, probablement formées par les outils en silex ou en corne. Le bateau a été découvert en 1955 lors de la construction de l'autoroute néerlandaise A28. La route devait passer au sud du village de Pesse dans la commune de Hoogeveen, à un endroit où il y avait une tourbière. Pour construire la route, la tourbe devait être supprimée, et lors de la fouille, un opérateur de la grue est tombé sur ce qu'il croyait être un tronc d'arbre de 2 m sous la surface. Un fermier local, Hendrik Wanders, a procédé à l'identification. Il a donné le bateau à l'Université de Groningen, où il a été examiné et lyophilisé pour le préserver. Il a été ensuite transféré au musée Drents, situé près du site de la découverte. Il y a eu des doutes sur l'utilisation en tant que bateau de cet artefact. Des experts danois se sont demandé si un tel petit bateau pouvait naviguer. En 2011, une réplique de la pirogue a été construite par l'archéologue Jaap Beuker et utilisé avec succès par un canoéiste. D'autres personnes ont théorisé que cela pouvait être un autre objet, par exemple un dispositif d'alimentation animale (une mangeoire). Beuker a noté que les animaux n'étaient pas élevés par les gens de l'époque où le bateau a été fait, et donc qu'il ne peut pas être une auge. Le bateau est également similaire dans la construction à d'autres pirogues préhistoriques trouvées dans d'autres pays.


Des embarcations de ce type ont été utilisées jusqu'au Moyen Âge en Europe. On en a retrouvé plusieurs épaves en basse-Loire, datant d'une époque relativement récente. En Afrique de l'ouest, de grandes pirogues sont appelées « pinasses ».  La pinasse est une sorte de pirogue traditionnelle sur le fleuve Niger, et sur ses affluents. C'est l'embarcation de prédilection du peuple Bozo, et des agriculteurs vivant et travaillant sur les rives du Niger. Il existe trois catégories de pinasse : pinasse collective ou grande pinasse ; pinasse de pêcheur ou petite pinasse ; pinasse touristique.

Dans certains pays ou régions, le recul des forêts ne permet parfois plus de trouver l'arbre idéal, vieux de plusieurs siècles, voire de plus de 1000 ans pour construire les très grandes pirogues qui pouvaient accueillir des dizaines de personnes ou porter un poids important de marchandises. Le Musée royal de l'Afrique centrale de Bruxelles expose une pirogue de 22,5 mètres de long pesant 3,5 tonnes.


La pirogue traditionnelle est monoxyle (sculptée dans un unique morceau de bois), et on lui ajoute des bancs, des étais, un balancier, voire des éléments de plancher, ainsi parfois qu'une décoration, qui pouvait et peut encore comprendre des éléments symboliques et protecteurs contre les mauvais esprits et le danger en mer ou sur l'eau. Elle est construite dans le tronc d'un bois peu putrescible, généralement à l'aide de feu, ce qui facilite le travail du bois, mais aussi le prémunit des attaques d'insectes xylophages et de champignons.

Les pirogues autrefois maniées à la perche, ou à l'aide de pagaie sont aujourd'hui propulsées par des moteurs parfois puissants, et construites avec des planches de bois assemblées ou d'autres matériaux que le bois. La pirogue est la base et l'origine d'embarcations plus élaborées : coupée dans sa longueur, puis les deux moitiés réunies par d'autres éléments, sa largeur peut être augmentée tant que la solidité est conservée et l'étanchéité assurée. Le savoir-faire nécessaire s'est élaboré progressivement en donnant lieu successivement à des modèles variés d'embarcation selon les lieux et les usages.

ARAWA


Le mot arawa désigne, dans la tradition maorie, l'une des grandes pirogues de haute mer, qui furent utilisées lors des migrations des Polynésiens pour le peuplement de la Nouvelle-Zélande, généralement nommée par les maoris Aotearoa. Les pirogues Te Arawa et Tainui furent creusés en même temps dans de grands arbres à Hawaiki, l'île mythique d'où viendraient les Maoris. Les pirogues appartenaient au Tama-te-kapua de la tribu des Nga-Oho. Après une série d'affrontements entre sa famille et celle du grand chef Uenuku, il fut décidé qu'il devrait aller s'installer plus loin dans le pays nouvellement découvert des précieux pounamu (jade néphrite). La tribu Te Arawa s'installa à Whanagparaoa, au cap Runaway. Les descendants actuels des colons Arawa vivent dans le Te Waiariki de la baie de l'Abondance, une région de plateau volcanique.

Hokule'a 

C'est une grande pirogue double célèbre pour avoir réalisé en mai-juin 1976 un voyage de 5370 kilomètres sans instrument de navigation entre Hawaï et Tahiti, voyage qui permettait de prouver la capacité des anciens Polynésiens à passer d'île en île dans l'océan Pacifique et donc à établir une parenté irréfutable entre les différentes populations du triangle polynésien. En langue hawaïenne, Hokule'a signifie "étoile du bonheur" et désigne Arcturus, dans la constellation du Bouvier. Elle est l'étoile zénithale de l'île principale de Hawaii, et permettait aux navigateurs venant de l'hémisphère sud de rejoindre aisément le groupe des îles Sandwich.

VA’A


Le va’a, aussi appelé pirogue polynésienne ou outrigger canoë, est une pirogue dont la stabilité est assurée par un balancier (ama) unique, relié à la coque par deux bras en bois (iato). Les liens sont assurés par des lanières de caoutchouc, à la fois résistantes et souples (uaua). Le rameur est équipé d'une pagaie simple comme en canoë, dont la pale est inclinée vers l'avant. On distingue les V1 (va’a hoe), V3 (va’a toru), V6 (va’a ono) et V12 (va'a tauati ou pirogue double).

Les principales différences entre le va'a et l'OC (Outrigger canoë hawaïen) tiennent dans l'absence de safran (partie d'un gouvernail) sur les va'a, quel que soit le modèle, et dans une esthétique plus tendue, plus fine. On ne rencontre jamais de V2, contrairement à son homologue OC2 hawaïen, du fait de l'absence de safran pour diriger.


À l'origine, les pirogues polynésiennes étaient en bois creusé. Actuellement, la pirogue moderne faite en fibre de verre ou en carbone est devenue un moyen de se mesurer sportivement lors de courses de pirogues polynésiennes, lesquelles, au fil du temps se sont fortement diversifiées.

VAKA


Vaka est un terme maori des îles Cook pouvant signifier à la fois tribu (vaka tangata), ou pirogue (vaka tere). Dans les autres langues polynésiennes, le terme existe également avec un sens identique ou proche, va'a (tahitien), waka (Maori de Nouvelle-Zélande), vaka en wallisien…

Celles-ci peuvent être d'architecture, de taille, ou de formes différentes en fonction de leur utilisation. Aux îles Cook on en distingue trois grands types :

Vaka purua, appelée également vaka turua, il s'agit d'une pirogue double ou catamaran. Ces pirogues qui étaient généralement utilisées pour les longues traversées inter îles, pouvaient mesurer pour les plus grandes jusqu'à 25 mètres de longueur et embarquer selon la tradition une cinquantaine de personnes ainsi que des provisions pour plusieurs semaines.

Vaka kumete : ces pirogues à coque unique, appelées également pa'i pouvaient elles aussi atteindre plusieurs dizaines de mètres de longueur et être utilisées pour des traversées au long cours.

Pahic ou pahi ou encore tipaerua étaient de grandes pirogues pouvant mesurer 25 mètres de long, utilisées pour naviguer d'île en île. 4 à 20 hommes pouvaient diriger cette embarcation selon la taille. Plus de 50 personnes pouvaient monter à bord de ces navires de guerre avec armes, vivres et bagages. Le bateau comptait une ou deux voiles, une plateforme centrale mesurait plus de trente mètres carrés.

Vaka tovere, appelées également vaka paiere, ces pirogues de petites tailles étaient et sont toujours utilisées essentiellement pour pêcher dans le lagon ou juste au-delà du récif. Celles-ci comportent également un balancier dénommé ama.

Il existe également des vaka modernes faits en fibre de carbone et autres matériaux nouveaux, utilisés pour les compétitions sportives ayant lieu chaque année comme le vaka 'eiva.

WAKA


Waka est un mot maori désignant les pirogues utilisées pour voyager en sécurité, d'île en île, sur l'océan Pacifique. Il existe des courses de waka, appelées waka ama, particulièrement populaires en Nouvelle-Zélande.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire